Reverse Factoring :
Artifice financier ou financement de l’économie réelle ?
Le Reverse Factoring, beaucoup en parlent mais les avis divergent sur sa réalité et son impact dans le financement interentreprises. En France, en 2014, quelle est la situation sur ce dispositif, qui le proposé, qui l’utilise et pour quels desseins ?
D’où vient le Reverse Factoring ?
Le Reverse Factoring est né du monde bancaire toujours novateur en matière de solutions de financement pour leurs clients. Aujourd’hui, la majorité des acteurs bancaires l’intègrent à leur catalogue d’offres. De plus, sa complexité apparente permet de renforcer la légitimité d’institutions financières à en assumer le montage et la gestion.
A quoi sert-il ?
Dans sa version originelle, le Reverse Factoring permet au donneur d’ordre d’utiliser les conditions d’escompte proposées par les fournisseurs. Le financement et la gestion peuvent alors être confiés à un partenaire bancaire qui va récupérer les avantages financiers auprès des fournisseurs tout en reversant une partie du produit financier au donneur d’ordres. Sans utiliser ses fonds propres, le donneur d’ordre peut donc bénéficier d’une rémunération basée sur l’escompte tout en permettant à ses fournisseurs un règlement avant l’échéance contractuelle et ce dans un cadre pré-défini.
Le Reverse Factoring s’est banalisé chez les offreurs financiers et s’est rapproché d’un autre produit de crédit court terme ; l’affacturage. On parle aujourd’hui d’affacturage inversé tant la différence entre les produits s’est amoindrie. Certains financiers n’y voient qu’une si faible différence que le mode de commercialisation, les contrats de financement et la structure des offres financières ressemblent à s’y tromper avec de l’affacturage « classique ». Les chiffres déclarés auprès de l’ASF (Association des Sociétés Financières) ne font que peu de cas d’une distinction entre les produits et le résultat de la performance du Reverse est comptabilisée comme de l’affacturage normal. Cette banalisation est dommageable car le Reverse Factoring offre un potentiel et un besoin de différenciation que nous allons évoquer.
Quelle est la situation en 2014 du Reverse Factoring en France?
Permettre un règlement anticipé pour les fournisseurs ne s’avère pas toujours un effort suffisant pour les donneurs d’ordre soucieux d’aider leurs partenaires, vitaux pour le fonctionnement de leur Supply Chain.
Un produit plus complet, cette fois émanant de prestataires de service est apparu ; Le Reverse Factoring Collaboratif. Dans cette version enrichie, le fournisseur profite d’un accès à un Portail Internet avec toutes les informations disponibles qui peuvent aller de la commande, les litiges, les demandes d’avoirs, les prévisions de cash, les avis de paiement. C’est donc un outil de gestion sophistiqué, que le donneur d’ordre met à disposition de ses fournisseurs. De plus, les informations sont à jour et donc fiables puisqu’elles émanent du Système d’Information du donneur d’ordres.
Le fournisseur peut donc piloter son poste clients, auquel s’ajoute la possibilité d’obtenir un règlement anticipé. Il s’agit donc d’un véritable service fournisseurs dont profitent fournisseurs et donneur d’ordres via une dématérialisation et une automatisation des échanges entre eux. Le financier fait partie de cette boucle triangulaire et peut ainsi accéder à des informations fiables afin de favoriser le financement au coût le plus juste des règlements anticipés.
Le Reverse Collaboratif trouve-t-il un écho prometteur dans les sociétés françaises ?
Initialement lancé dans de très grands groupes hexagonaux, et promu come un produit de financement par les établissements bancaires ; le Reverse Factoring a connu une progression timide. Le Reverse Collaboratif, lui se déploie progressivement tant chez les grands groupes que chez les grosses PME voire des PME. Il est dans l’air du temps car il permet de resserrer les liens entre les acteurs de la Supply Chain. Ce dispositif permet de modifier durablement la relation fournisseurs et de l’appréhender comme un partenariat.
En 2014, quasiment tous les secteurs de l’économie française ont intégré la notion de Reverse Collaboratif (Energie, Distribution alimentaire et spécialisée, textile, mode, manufacturiers, telecom, etc).
En le dosant judicieusement, Le Reverse Collaboratif joue de son avantage permettant à l’entreprise de le positionner dans l’axe médian des achats, comptabilité fournisseurs, trésorerie et finance.
Tout demeure affaire de dosage. Certains programmes utilisent l’opportunité du financement contre des allongements des délais de paiement qui ne correspondent pas (toujours) au cadre législatif. Vécu comme une pincée de sel sur une plaie par les fournisseurs, la relation avec le donneur d’ordre aboutit au résultat inverse d el’objectif recherché. En revanche, il convient d’insister sur le fait qu’un programme qui prend en compte les besoins et contraintes des fournisseurs et du donneur d’ordre permet d’instaurer un caractère durable et une relation plus sereine.
Produit financier ou service ?
La finance d’entreprise a pris conscience que si les fournisseurs sont maltraités, le revenu clients peut en pâtir immédiatement. On parle de Supply Chain mais en réalité, toute l’entreprise est une chaîne dont la résistance est testée sur son plus faible maillon ; la relation fournisseurs. Le Reverse peut permettre aux fournisseurs de se prémunir de situations financières difficiles et les fragilisant vis-à-vis de leurs clients, tout en appréciant la plus grande transparence dont peut faire preuve le donneur d’ordre. D’ailleurs, les solutions techniques qui servent ce type de démarche se dénomment aujourd’hui Portail Fournisseurs ou Services Fournisseurs en ligne faisant fi du seul caractère de financement initial.
Le Portail fournisseurs permet de resserrer les liens avec fournisseurs ou sous-traitants tout en contribuant à une dématérialisation et automatisation des traitements. Plus les traitements sont fiables et rapides, plus le fournisseur peut connaitre la situation de ses factures chez le client qui lui-même apprécie que sa comptabilité fournisseurs soit moins perturbée par les appels anxieux des fournisseurs et puisse mesurer l’encours fournisseurs le plus tôt possible.
La possibilité de bénéficier d’un règlement anticipé dans des conditions simples et lisibles tisse plus étroitement le lien entre fournisseurs et clients.
Le Reverse, artifice financier ?
En ne limitant pas le Reverse à son simple rôle de solution de règlement anticipé, en lui donnant un nouvel essor flanqué d’une batterie de services à valeur ajoutée, les prestataires de service offrent des perspectives fortes de développement pour le Reverse. Ce type de dispositif, à la main du donneur d’ordres pourra évoluer pour offrir d’avantage de bénéfices aux fournisseurs et rendre la relation bilatérale encore plus transparente. Le tiers financier n’intervient que quand le besoin de financement est motivé. A ce titre, il participe au programme, il ne le contrôle pas. Ceci permet également d’instaurer une compétitivité entre financiers participants au programme.
Dans un sens, la relation donneur d’ordres et fournisseurs est désintermédiée car chacun est en prise directe avec sa contrepartie via un Portail Internet que contrôle l’initiateur du programme, le donneur d’ordre.
Financement durable de l’économie ?
Nous l’avons vu, Factors et Banques intègrent ce produit mais essentiellement sous l’angle financement. Cela s’avère insuffisant car les transactions dans la Supply Chain démarrent très en amont d’une facture validée et requièrent donc des fonctionnalités appropriées que les banques ne sont pas toujours légitimes ou spécialisées pour fournir.
Par ailleurs, les contraintes croissantes sur les établissements financiers impactent la taille et les montants des encours fournisseurs à financer. La durée de l’engagement ainsi que les conditions financières peuvent être fragiles. Face à cette complexité d’engagement pérenne, des investisseurs hors du monde bancaire via des fonds communs de titrisation (FCT) viennent apporter leur concours au financement de la Supply Chain. D’importantes disponibilités en ressources financières et des durées d’engagement relativement longues tout en offrant des coûts de financement compétitifs permettent d’offrir une nouvelle dimension au Reverse. Ces FCT permettent également au donneur d’ordres de s’assurer que tous les fournisseurs désireux d’utiliser cette ressource supplémentaire de financement seront servis et sans risque de rupture de l’approvisionnement … en crédit cette fois.
Malgré le faible coût de la ressource financière, les fournisseurs peinent à trouver les conditions de crédit court terme en adéquation avec leurs besoins. Ces nouvelles disponibilités financières véhiculées par les FCT apportent une contribution, fort bienvenue dans une Supply Chain moribonde. Les donneurs d’ordre associent volontiers les FCT dans leurs démarches de Reverse car la mécanique de distribution des fonds, même si spécifique, est transparente pour les fournisseurs. De plus, cela leur permet de limiter le recours à l’affacturage des fournisseurs et de conserver leurs propres lignes bancaires pour d’autres opérations.
Via les FCT, ces disponibilités nouvelles de liquidités sont prépondérantes auprès des fournisseurs financièrement à la peine ou bien soucieux d’une meilleure gestion de leur poste clients. Le crédit court terme devient plus accessible, pour un plus grand nombre tout en satisfant les exigences de financement déconsolidant. Carburant de l’économie, le financement du poste fournisseurs peut exploiter ce gisement basé sur un vaste réservoir de liquidités.
Le Reverse Collaboratif, assorti ; d’une dimension partenariale, de services innovants, d’engagements pérennes et de liquidités nouvelles, peut s’affranchir de son carcan étroit d’artifice financier pour pérenniser sa légitimité dans le financement durable de l’économie réelle. |